Ce sera officiel mercredi : l’Europe va taxer les géants américains du numérique.
La commission européenne en fera l’annonce après-demain, mais il est probable que les ministres des Finances du G20, réunis à Buenos-Aires, en parleront dès aujourd’hui. Oui, l’Europe va créer une taxe de 3% sur les revenus européens de Google, Apple, Amazon et les autres parce qu’elle considère que ces géants ne paient pas assez d’impôts sur son sol. Evidemment, aucun nom n’est cité, la taxation concernera les sociétés dont le chiffre d’affaires dépasse 750 millions de dollars, mais cela ne trompe personne.
L’idée est française -qui a un génie reconnu, parfois hélas reconnu, en matière fiscale-, l’Allemagne, l’Espagne, l’Italie suivent, et c’est devenu la position de la Commission de Bruxelles, portée par Pierre Moscovici -un Français bien sûr. On sait que les GAFA paient peu d’impôts dans les grands pays européens, ils optimisent la localisation de leurs revenus en fonction du niveau d’impôt des pays, Irlande, petits Etats, paradis fiscaux, Etats-Unis, c’est assez facile avec la création immatérielle. Cette taxe rapporterait de 5 à 8 milliards d’euros au niveau européen.
Soyons clairs, ce type de taxation sur les revenus (publicitaires en l’occurrence) est frustre voire bizarroïde : on peut avoir des revenus et pas du tout de bénéfice et une taxe peut du coup tuer une entreprise. Mais ce ne sera pas le cas cette fois-ci et il y a une logique européenne à se faire entendre et respecter.
Taxation légitime, dites-vous, mais aussi un constat d’échec
Oui. L’Europe, ce faisant, pratique le protectionnisme fiscal comme Donald Trump pratique le protectionnisme commercial. Au fond, c’est l’échec de la concertation internationale. L’OCDE travaille depuis longtemps sur la taxation de ces entreprises, mais cela avance si lentement que les GAFA auront disparu ou été ubérisés à leur tour quand cela marchera. Logique : Washington bloque toute répartition des impositions qui lui serait défavorable.
Au total, la décision européenne est donc compréhensible parce que l’Europe ne peut pas subir une double peine impunément : elle n’a pas Google et Facebook, elle ne touche rien sur l’activité de Google et Facebook. Mais cette décision témoigne que l’on est entré dans l’ère du « œil pour œil dent pour dent » où chacun montre ses muscles davantage que ses neurones.
Dominique Seux Chroniqueur sur France inter 19Mars 2018
Laaroussi Cécile
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